… repéré ça sur Twitter ; « le personnage d’animé que je voulais être vs le personnageque je suis devenu »* accompagné des illustrations de deux personnages ; ça m’a de suite fasciné, moi qui en ai consommé des animés et des mangas** qui continue, encore aujourd’hui, à en visionner ; y en a pléthore de genres et d’histoires.
La répartition extrêmement genrée des mangas m’a toujours dérangée. On parle de [Shônen] (qui veut dire en japonais : garçon) ou [Shôjo] (fille) en gros mangas destinés aux garçons ou aux filles. La baston d’un côté ; les histoires de cœur de l’autre***. Il y a aussi le [Seinen], là c’est plus adulte, souvent violent et gore, ou encore « psychologique ». Il y a les inclassables ; par exemple, le contemplatif [Mushishi] de l’excellente Yuki Urushibar ; une femme, assez rare dans le milieu des [mangakas] (dessinateurs de mangas) quasi exclusivement masculin. Manga traduit, mais de manière assez inexplicable jamais l’animé ; on peut remercier pour cela la communauté d’amatrices et eurs pour leur travail : pour visionner tout ça, suffit d’aller du côté de Neko-Sama.
… à la vue de ces tweets, j’ai pensé à Ryo Saeba – Nicky Larson, en France – ; j’en ai visionné pas mal, enfant, des épisodes de l’animé [City Hunter] en VO. Dans la typologie des genres évoquée plus haut, il s’agit d’un Seinen,
… comment dès lors un Seinen s’est retrouvé devant mes yeux ?
Ça a toute une histoire. Celle d’un certain orientalisme (j’en parlais dans une vidéo), orientalisme dans un sens plus large (et plus rigoureux que celui de Saïd) l’orient ne se résumant pas aux pays arabes. Orientalisme qui n’a fait que susciter le mépris des programmateurs pour des dessins animés, si dessins animés, c’est que ça doit être pour enfant. Et c’est ainsi que des millions de gamin·es se sont retrouvés face à des animés violents et machistes.
Ryo Saeba (Nicky Larson) avec lequel j’ai passé toute mon enfance, mirant ses frasques, harcelant tout personnage féminin passant à sa portée, les touchant, volant leurs sous-vêtements, les reluquant, ne leur laissant pas une seconde de répit ; et tout ça dans un ton badin, de blague. J’en riais, forcément. Ou encore ce même Ryo Saeba faisant fi de la loi, nettoyant la ville de Tokyo de ses parasites dans la plus pure tradition des vigilant movies. Malgré l’atténuation mise en place par les doubleurs (le plus connu étant Maurice Sarfati), faisant des antagonistes (tueurs sans pitié, souvent cruels) des caricatures ; transformant les clubs de strip-tease en restaurants végétariens, coupant (censurant ?) certaines scène sexuelles trop explicites. Le Seinen se muant en une sorte de Shônen.
Personnage ou personne ; il est toujours difficile de se défaire d’un caractère (character) auquel on s’est identifié. Il a fallu faire se travail, cette dissociation. Se dissocier de Ryo Saeba et sa culture du viol. Imaginaire que l’on a incorporé ; forcément, enfant, on admire le héros ; sa dextérité et son calme. On fait corps avec. Pas uniquement dans et par cet animé, mais l’ensemble des productions, avec toujours le personnage récurrent du hentaï (pervers en japonais), il y en a pléthore on peut citer Oolong ou Mutenroshi (Dragon Ball), Kakashi et Jiraya (Naruto)… imagerie masculiniste omniprésente, les femmes réduites a de simples personnages fonction, à sauver ou simplement là pour admirer les gestes héroïques d’un quelconque personnage masculin.
… « le personnage d’animé que je voulais être vs le personnage que je suis devenu » ; c’est peut-être ça, le retour sur soi, sur son imaginaire ; voire son devenir.
*« The anime character I wanted to be when I was a Kid vs the character I actually turned into »
** Manga étant la bande dessinée, l’animé le dessin animé.
*** Pour résumer à l’excès.