Une conversation par courriel, un·e ami·e algérien·ne qui y vit encore, en Algérie, il a surgi, comme ça le courriel, de nulle part, iel est tombé·e par le hasard de l’algo’ sur mes vidéos youtube, a regardé, et toujours ce sentiment mitigé, chez certain·es algérien·nes à l’évocation de la colonie [1] et des études post-coloniales ou décoloniales, ce réflexe, c’est du passé, pourquoi le remuer ? Exactement la réaction qu’avait eue ma mère, il y a quelques mois, en pleine affaire des déboulonnages de statues, de passage chez elle, préparant alors la vidéo autour du Singe de Kafka, lui expliquant de quoi il s’agissait, gênée, ‘savait pas quoi dire, si ce n’est pourquoi t’intéresser à ça ? c’est du passé.
Pourtant elle m’en avait raconté des histoires sur la colonie, née 1954, elle en a encore des souvenirs, elle les porte toujours, me les a racontés, me les raconte encore ; un épisode, en particulier revient, quand l’armée française débarquait au village. Elle te restitue ça comme une madeleine de Proust écrite en plein roman de guerre. Joie entremêlée de terreur. Ce morceau de sucre que lui donnait sa mère (ma grand-mère donc) pour qu’elle ne pleure pas, qu’elle n’attire pas l’attention des patrouilles, un morceau de sucre, c’était rare qu’elle me raconte, du sucre c’était la fête, ta grand-mère me le donnait comme on offrirait du chocolat aujourd’hui ! Mais ça annulait pour autant pas la terreur à l’entour… elle m’en a raconté pas mal d’histoires, comme ça, ma mère, dans les villages où elle a vécu, avec ma grand-mère et mes tantes – du côté de Chaabat ou de Hammam Bouhdjar.
… qu’elle veuille plus en entendre parler, de colonie, de colonisation, d’occupation, de ségrégation et de racisme, ça se comprend, peut se comprendre d’une certaine manière, nous on en a fini avec ces histoires, qu’elle me dit, pourquoi ils reprennent ça ?
– peut-être pour terminer le travail…